Chers lecteurs,

dans les villes avec une part modale du vélo importante, la plupart des cyclistes sont des cyclistes “toutes conditions climatiques” : ils pédalent quand les températures sont moyennes, quand il fait chaud, quand il fait froid, quand il pleut, quand il neige.

Mais durant l’hiver, l’usage du vélo peut se réduire drastiquement. Cela semble se produire surtout dans les villes où la part modale du vélo est habituellement faible. Pourquoi cette hémorragie du nombre de cycliste et que pouvons nous faire pour la contenir ?

Il y a des endroits où pédaler l’hiver est normal

A Copenhague, au Danemark, avec une part modale du vélo au-dessus de 30 %, 80 % des cyclistes continuent d’utiliser leur vélo durant l’hiver. Aux Pays-Bas, avec une part modale du vélo avoisinant les 25 %, ce chiffre est encore plus important, environ 85 % des cyclistes maintiennent leur activité l’hiver (Sabir 2008). A Graz, en Autriche, là où la part modale du vélo est d’approximativement de 16%, la proportion des cyclistes qui pédalent l’hiver est comprise entre 50 et 60 % (Graz Bicycle Counters) ; En parallèle, à Vienne, dans le même pays avec un climat tout à fait similaire, la part modale du vélo est d’environ 5 % et seulement 23 % des cyclistes le sont encore pendant l’hiver (Fahrrad Wien).

Le constat de la cyclabilité hivernale peut s’étendre aux pays avec des hivers plus rigoureux, plus longs et avec des jours plus courts qu’au Danemark, qu’en l’Autriche ou aux Pays-Bas. Dans certaines villes de Suède et de Finlande, la part modale du vélo peut dépasser les 20 % même en cas de neige et avec des températures bien en dessous de 0 degré. Une partie considérable des cyclistes de ces pays, entre 30 et 50 %, continue de pédaler durant la saison froide.

En raison des avantages du vélo qui est rapide, peu onéreux, accessible à tous, amusant, sain, et parfois même en hiver vivifiant, continuer de l’utiliser durant cette période aide à renforcer les défenses immunitaires et à lutter contre les troubles affectifs saisonniers.

Ce n’est pas une expédition polaire

Des recherches concluent qu’en raison des vitesses pratiquées plus faibles et de l’attention accrue des usagers, faire du vélo pendant l’hiver est plus sûr que pendant l’été. Cela reste à discuter. Même aux Pays-Bas, les autorités sont souvent mal préparées quand il neige plus qu’à l’accoutumé et des accidents supplémentaires peuvent alors se produire.

Néanmoins, des règles de base peuvent suffire : utiliser son bon sens en portant des habits adaptés à la saison, accorder un peu plus d’attention à la maintenance (graisser les chaînes, avoir des lumières en bon état) et laver plus souvent sa monture qui se salie plus vite.

Quand la chaussée est humide ou enneigée, soyez un peu plus prudent que d’habitude. Mais pour pédaler tous les jours, il n’est pas utile de s’équiper de pneus cloutés ou de vêtements hivernaux à usage professionnel.

Dans les faits, les conditions climatiques rudes (tempête de neige, orage) sont souvent limitées à quelques jours ou quelques semaines par an. Ce n’est a priori pas un motif pour arrêter d’être cycliste pendant plusieurs mois. Mais dans la pratique, beaucoup de personnes, et encore plus dans les villes avec une faible part modale du vélo, arrêtent de pédaler.

La disparition des pistes cyclables

Il est logique que les cyclistes ne se sentent pas soutenus dans leur pratique si à la suite de chute de neige leurs voies réservées ont disparues faute d’avoir été dégagées. Mais certaines villes agissent :

• A Copenhague, où 80% des cyclistes le sont encore l’hiver, le déneigement des pistes cyclable est une priorité absolue. Ils ont massivement investi dans des déneigeuses spécialisées. Vous pouvez voir ici les balayeuses pour piste cyclable de Copenhague en action ;
• La ville d’[/L]Örebro[/L], en Suède, est dotée d’un plan d’action pour le déneigement et le sablage des pistes cyclables durant hiver et pour l’enlèvement des graviers au printemps ;
• A Oulu, en Finlande, la maintenance hivernale des pistes cyclables prime sur celle des routes ;
• Zaanstad aux Pays-Bas a pour objectif d’améliorer l’entretien des pistes et l’information sur leur disponibilité via un site web sur lequel les cyclistes peuvent signaler l’état des pistes. Cet outil fait partie d’un projet pilote financé par l’Etat pour améliorer la maintenance hivernale des pistes cyclables.

Aux Pays-Bas, le centre d’expertise sur les politiques cyclables, Fietsberaad, fait le constat suite à des recherches que beaucoup de collectivités n’ont pas de politique d’entretien suffisante. Ils émettent quelques recommandations de bases :

• S’y prendre dès l’été en apprêtant matériels et équipements et en élaborant un plan de priorisation de l’entretien visant à rétablir rapidement l’usage des principales routes cyclables ;
• Éviter d’installer des infrastructures qui compliquent la maintenance hivernale comme des plots, des courbes trop étroites ou des bordures trop hautes ;
• Utiliser la technologie de maintenance appropriée, par exemple ne pas saler mais évacuer mécaniquement la neige, avec au besoin des machines spécialement conçues pour les pistes étroites.

Parfois, les cyclistes doivent se signaler pour voir leur piste déneigée. Les cycliste belges peuvent trouver sur le site de la Fédération des cyclistes belges / Fietsersbond (lien en flamand) un courriel standard à transmettre à leurs autorités. Si vraiment rien n’est fait, vous pouvez trouver une solution par vous-même : ici avec une voiture à pédale ou là avec un vélo.

Après tout, c’est de cette manière qu’un petit groupe de bénévoles a convaincu la ville de Calgary au Canada d’entretenir les pistes cyclables durant l’hiver. Aujourd’hui Calgary dispose d’une carte détaillée des pistes et des trottoirs dégagés par temps de neige.

Quand elles travaillent à la définition de leur plan de priorisation, les collectivités peuvent se demander si cela à un sens de déneiger les pistes pour une poignée de cyclistes ? Ou à l’inverse s’il y a seulement une poignée de cyclistes car les pistes ne sont pas correctement déneigées ?

Motiver les citoyens

Le défi pour encourager la pratique du vélo pendant l’hiver est de présenter le fait de pédaler durant cette saison comme une activité normale effectuée par des gens “normaux”. De nombreuses villes ou régions dispensent des conseils sur la visibilité, l’entretien des vélos ou les vêtements ; certaines offrent également des prestations supplémentaires :

• A Vienne, Fahrrad Wien (lien en allemand), un département de l’agence de mobilité viennoise consacré au vélo, assure un service de contrôle gratuit des vélos des usagers aux carrefours cyclistes les plus importants ;
• Les Transports du Grand Manchester offrent un conseil individualisé pour trouver le bon itinéraire cyclable durant l’hiver, des cours de maintenance gratuit pour les vélos et jusqu’à six heures de formation individuelle pour les navetteurs à vélo ;
• A Bruxelles, les cyclistes présents sur les routes le mois de novembre ont reçu des petits-déjeuners gratuits et des lumières pour leur vélo ;
• D’autres organismes ont réalisé de belles ou amusantes vidéos pour promouvoir l’usage du vélo l’hiver comme le Ottawa Bicycle Lanes Project au Canada , le SmartaResor en Suisse ou le RouGETomate au Québec.

L’essayer, c’est adopter

• Regardez cette vidéo d’Eltis sur la promotion de l’usage du vélo en hiver à Oulu
• Örnsköldsvik dans le nord de la Suède a offert gratuitement des pneus cloutés aux navetteurs qui s’engageaient à utiliser le vélo au moins trois fois par semaine. En échange, les participants ont dû utiliser un GPS pendant leur trajet en vélo, tenir un journal hebdomadaire et faire un rapport sur la qualité des pistes cyclables. Seul 30 % des participants étaient déjà des cyclistes durant l’hiver. Après la période d’essai, 79 % des participants ont continué de faire du vélo au moins trois fois par semaine.
• Le même type de campagne à été conduit à Linköping et Gävleborg (lien en suédois) en Suéde avec la distribution de pneus hivernaux, de lumière pour vélo, de GPS pour vélo, de vestes réfléchissantes, de housses de selle ou de casques.
• Depuis 2012, la course contre la montre cycliste annuelle en Finlande a une édition d’hiver en février et en mars ; avec pour devise : « Pédaler l’hiver est un bon exercice et surtout c’est amusant et rafraîchissant si vous avez la bonne habitude et le bon équipement ».

En conclusion, les gens aiment pratiquer le vélo l’hiver

L’inspiration est à chercher dans les paradis enneigés de Scandinavie qui nous prouve par l’exemple que faire du vélo est normal même lors de circonstances climatiques rigoureuses. Toutefois, la vision de cyclistes épaissement emmaillotés sur fond de paysage enneigé pourrait être un facteur de rejet chez les cyclistes des pays au climat plus modéré. Comme Mikael Colville-Andersen le souligne sur son blog, The Copenhagenize, nous devons prendre conscience des effets néfastes induit par la complexification exagérée de l’usager du vélo durant l’hiver.

Mettre à disposition une infrastructure praticable, dispenser quelques encoura-gements et fournir une aide pour l’entretien des vélos peut déjà vous amener loin. En général, plus il y a de cyclistes en moyenne, plus la part de ceux qui continuent à pédaler pendant l’hiver va augmenter ; Ces personnes pourront profiter de la fraîcheur, gagner du temps et ne plus avoir de problème avec les pare-brises givrés ou les transports collectifs bondés et humides.

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